Association suisse des organes officiels de contrôle des champignons

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Auteurs: François Brunelli et Heinz Göpfert
  Adaptation pour le site: Jean-Claude Michel

Les Gastéromycètes (2)

23ème lettre

Mon cher neveu,

Les formes et la biologie particulières des Gastéromycètes ont conduit les mycologues à créer pour cette classe de champignons des termes descriptifs particuliers dont je me propose ici de te préciser les définitions, accompagnées de quelques croquis.

Les Gastéromycètes (2)

Les Gastéromycètes sont des Basidiomycètes: sous le microscope, bien qu'ici la difficulté d'observation soit plus grande, on trouvera donc des basides, porteuses de basidiospores. L'ensemble des basides constitue dans la règle un hyménium qui tapisse les parois internes des petites cavités intérieures nommées des logettes (en latin: loculi). Ces logettes sont noyées dans la trame qui est un entrelacs d'hyphes parfois alignées radialement. L'ensemble trame + logettes constitue la gleba. Chez certains Gastéromycètes, la partie inférieure de la gleba est stérile et peut même simuler une sorte de pied; on parle alors de subgleba, parfois nettement séparée de la gleba par une couche particulière de cellules, le diaphragme. Parmi les hyphes de la trame, certaines ont une paroi épaisse — on parle d'hyphes squelettiques — ; ces hyphes, que l'on peut observer encore dans le basidiome mûr, lorsque la gleba est réduite en poudre, constituent le capillitium.

Un grand nombre de Gastéromycètes sont épigés, mais il en existe aussi qui sont hypogés (épigé = dont le basidiome se développe hors du terrain, sur sol nu ou sur du bois; hypogé = dont le basidiome se développe entièrement dans le sol, comme les Truffes; les débutants en mycologie se trompent d'ailleurs souvent et pensent avoir trouvé des Truffes, qui sont des Ascomycètes, alors qu'ils ont récolté des Gastéromycètes hypogés, qui sont des Basidiomycètes).

La gleba est en général enfermée dans un peridium (on dit aussi une péridie), comportant généralement plusieurs couches superposées; selon les espèces et les genres, on distinguera un exoperidium (exopéridie), à une ou plusieurs couches, et un endopeiïdium (endopéridie), également à une ou plusieurs couches. L'exoperidium est parfois encore entouré, totalement ou en partie, d'une couche mycélienne externe. Il peut aussi se prolonger, au cœur de la gleba, en une sorte de colonne stérile en forme de massue, nommée une columelle ou une pseudocolumelle.

L'exoperidium se détache différemment, suivant les genres et les espèces, de l'endoperidium, et ce mode de séparation est un important caractère de différentiation. Chez le Lycoperdon plombé (Bovista plumbea), il se pèle comme la coquille d'un œuf, chez les Lycoperdons proprement dits (Lycoperdon spec.), l'exoperidium se fragmente, constituant à la surface des verrues furfuracées, granuleuses, coniques ou rassemblées en faisceaux d'aiguillons en pyramides. Dans ces cas, l'exoperidium finit par disparaître, laissant à nu l'endoperidium d'aspect parcheminé. L'épaisseur de l'exoperidium peut être très réduite (la plupart des Lycoperdon) ou au contraire très importante (plusieurs mm, en particulier chez les Geastrum et chez les Scleroderma).

Le cas des Géastracées (Geastrum, du grec: «gué» = la terre, «aster» = étoile) est particulier: juste avant la maturité, l'exoperidium, épais, se déchire en lanières — leur nombre intervient comme caractère de détermination —, ces lanières s'arquent vers l'extérieur, leurs pointes prennent appui sur le sol et soulèvent de quelques centimètres au-dessus du sol l'endoperidium et son contenu. Le champignon présente alors l'aspect d'une étoile portant en son centre une sphère ayant l'aspect d'un «Lycoperdon». Certains Géastres sont hygroscopiques, c'est-à-dire que l'étoile s'ouvre et se ferme au gré des variations du taux d'humidité du milieu. Le mode de dispersion des spores est ici le même que pour les Lycoperdons proprement dits.

Les Nidulariales sont étonnantes. Imagine de petits calices plus ou moins coniques, d'abord fermés par un couvercle membraneux, nommé un épiphragme (ou aussi un opercule, dans certains ouvrages); quand ce couvercle se déchire, on voit que le fond du calice est occupé par de petites pastilles; chacune de ces pastilles, nommée une péridiole, est en somme un mini-Lycoperdon fixé habituellement sur la paroi interne du calice par un cordonnet nommé un funicule. Les péridioles et les spores qu'elles contiennent attendent la goutte de pluie qui les éjectera du calice, le funicule fixant alors la péridiole sur un brin d'herbe ou sur un autre support. Etranges nids d'oiseaux miniatures, étrange mode de dispersion des spores par petits paquets.

Un mot encore sur les Phallales, dont les espèces sont parmi les plus belles et les plus curieuses qu'un mycologue peut rencontrer dans sa vie. Au début de son existence, une Phallale a la forme d'un œuf noyé dans une masse mucilagineuse qui, plus tard, deviendra une volve entourant le base du champignon développé. Le carpophore final présente des formes très variées et très belles: aspect de morille, de pieuvre, de grillage, de fleur ou de lanterne, fréquemment de couleur rouge orange intense. Intéressant est ici le mode de propagation des spores: La gleba verdâtre est mise à nu en gouttes ou en traînées visqueuses sur le carpophore et elle sent très mauvais — odeur cadavérique —, ce qui attire, mouches et insectes qui sucent avidement cette gelée nauséabonde, y compris les spores, de très petites dimensions; ils les emportent ainsi plus loin, ...où ils les déposent avec leurs excréments.

Pour terminer aujourd'hui, je te dirai encore deux choses: Il existe des Gastéromycètes énormes (par exemple le Lycoperdon géant [Langermannia gigantea] qui peut dépasser 40 cm de diamètre et peser plus de 10 kg), mais aussi des Gastéromycètes minuscules dont le diamètre n'atteint pas 1 mm (par exemple un Mycocalia minutissima, fixé à des débris végétaux divers dans des stations très humides). Quant aux spores, chez tous les Gastéromycètes elles ont des formes possédant un axe de symétrie et plusieurs plans de symétrie: sphériques, ellipsoïdales, fusiformes ou cylindriques. Leur apicule n'est jamais déjeté, mais toujours fixé dans le prolongement de l'axe de symétrie.

J'accompagne ma lettre de quelques dessins et schémas explicatifs. Dans une prochaine correspondance, je te présenterai quelques genres et espèces de cette classe à part de champignons. En attendant,
tu as le bonjour de

Tonton Marcel

 

 

 

 

A, B:

C:

D:

E:

a, b:

c:

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f:

g:

h:

k:

 

 

 

Schémas de Gastéromycètes

Silhouette d'un Geastrum

Exemple de NidularialeTeuerling

Exemple de Phallale

Exoperidium

Endoperidium

Gleba (en E, la gleba est sous le grillage)

Pseudocolumelle

Subgleba stérile

Diaphragme

Péridioles

Ostiole